27 oct. 2017

#MoiAussi


J'ai d'abord pensé que je ferais partie de celles qui assisteraient silencieusement au mouvement de libération de la parole à propos du harcèlement sexuel. 

J'ai milité plusieurs années dans une association de lutte contre le harcèlement sexuel dans l'enseignement supérieur, CLASCHES. Et je me pensais suffisamment forte et distanciée vis à vis de ce sujet, capable d'en parler, y compris de situations personnelles. 

Mais devant la vague des révélations, l'ampleur de la participation au fil des jours, la présence quotidienne de ce sujet dans les medias, et face à la nécessité de décider de ma prise de parole, j'ai réalisé que ce n'était pas si simple. 
J'ai pris le temps d'observer ce que cet événement provoquait en moi. A côté de la satisfaction à voir cette parole se libérer, à assister à des débuts de prise de conscience, à côté de l'admiration, de l'empathie et de la reconnaissance pour celles qui osaient se manifester et dénoncer, je ressentais un vrai malaise, des sentiments beaucoup plus négatifs, de la colère, le besoin dans un premier temps de rester à l'écart du choeur des révélations. 

J'ai fini par admettre que cela me fragilisait, au point que j'ai cessé assez rapidement de lire les témoignages et les dénonciations. 
Tous ces récits, détaillés ou non, venaient réveiller des souvenirs désagréables voire douloureux – ce qui ne remet nullement en cause leur légitimité.

La stratégie du tri 


Mais surtout, j'ai compris qu'ils me confrontaient à mon déni, à la façon dont je gérais intérieurement mon histoire et les violences sexuelles en général. 
Alors que je me pensais capable de les repérer, de les admettre et de les verbaliser, au moins pour moi-même, j'ai réalisé que je les triais. 
Ce tri s'opère selon une figure concentrique : 
vers l'extérieur du cercle, se situent les situations qui peuvent émerger clairement à ma conscience, que je peux évoquer et dénoncer (même si je n'ai jamais porté plainte contre personne). Plus on se rapproche du centre du cercle, plus il s'agit de situations difficiles à verbaliser, voire à me représenter, des situations que j'ai pu en partie refouler/oublier, dont je n'ai pas parlé pendant très longtemps, et que je continue à ne pas évoquer pour certaines. 

En essayant de lister pour moi-même ces situations, en les observant revenir à ma mémoire, j'ai réalisé que le critère de ce tri n'était pas fonction de la gravité des agressions subies, ni de leur impact plus ou moins traumatique. Le critère majeur tient en premier lieu à la personne agresseuse : plus celle-ci est proche et connue, plus la situation est difficile à évoquer, voire même à qualifier d'agression ou de violence.



 Au plus loin, la rue


Ainsi, les situations que j'ai l'habitude d'évoquer sont des agressions commises par des hommes inconnus, dans des lieux publics, extérieurs, collectifs. Ce sont des agressions ponctuelles : je n'ai jamais recroisé mon agresseur par la suite. Il s'agit, par exemple, d'une agression sexuelle dans le hall de mon immeuble, quand j'avais 16 ans, par un homme qui m'avait suivie dans la rue alors que je rentrais chez moi. Ou encore d'un homme croisé dans un parc qui se masturbait en public. De toutes les agressions verbales (aussi bien sexistes que lesbophobes) subies dans la rue au fil des années, malheureusement bien trop fréquentes pour être dénombrées. 

Pendant assez longtemps, je me suis raconté que mon expérience des violences sexuelles se limitait à ça. Ce n'était pas seulement que je triais sciemment ce que je racontais : le tri s'opérait aussi dans ma conscience, par un phénomène plus ou moins intense de refoulement. Et je parvenais à peu près à me convaincre moi-même que je n'avais pas d'autres choses à dénoncer. Ces situations que je situe dans la partie externe de mon schéma de tri, je peux les mettre à distance de moi, d'une certaine façon, et j'ai pu sans difficulté les qualifier d'agressions : même si elles m'ont impactée, en particulier cette agression dans mon immeuble qui a été traumatique et dont je n'ai pu parler à personne à l'époque, j'avais d'emblée conscience que je n'étais en rien responsable, que le problème se situait chez cet homme, pas chez moi. Et j'ai pu ressentir de la colère et de l'indignation, contre lui et contre le fonctionnement de cette société. Par ailleurs, je ne l'ai jamais revu. Et même si j'ai eu peur de le recroiser pendant une période, je n'ai jamais été confronté à nouveau à mon agresseur. 

En fait, ces situations rentraient dans mon cadre de pensée, celui que l'on m'avait transmis et que l'on partage globalement dans mon milieu social, et dans l'ensemble de la société : il existe des hommes violents, qui agressent les femmes, et le monde extérieur peut être dangereux quand on est une jeune fille ou une femme seule. Ça arrive. En quelque sorte, on m'y avait préparée.

Entre deux, au travail et au lycée 


Mais il y a bien d'autres situations qui ne rentrent pas complètement dans ce cadre, voire pas du tout. Et plus elles s'en éloignent, plus il devient difficile de les évoquer, de se les représenter.

En-dessous de cette première strate de situations que je peux relater sans problème, il y en a une seconde, déjà un peu plus délicate, qui concerne les situations de harcèlement vécues dans des lycées : l'une en tant que salariée, l'autre en tant qu'élève. Dans les deux cas, il s'agissait d'hommes adultes, un proviseur et un prof. Ces deux situations étaient plus diluées dans le temps, plus sournoises aussi, et caractérisées par un déni massif de l'entourage professionnel (infirmière scolaire, direction, CPE, Rectorat) qui pourtant savait, sans aucun doute possible (plusieurs plaintes avaient été prononcées).


Ces deux situations étaient plus difficiles à dénoncer, parce qu'il n'y a pas eu envers moi d'actes, pas d'agression physique, pas d'insultes : il s'agissait de propos malveillants, de regards déplacés, de manipulations, de remarques sur le physique, de l'instauration d'un climat hostile... C'était, par exemple, de la part du proviseur, le fait de venir s'installer dans mon bureau en l'absence de ma collègue (alors qu'il avait un bureau à lui où il était sensé travailler) et de mettre de la musique (sans me demander mon avis bien sûr), en l'occurrence uniquement des chansons contenant des propos sexuellement explicites. Ceci s'inscrivant dans un comportement quotidien, récurrent : une accumulation de "petites" choses qui font se sentir vulnérable.
Dans les deux cas, j'ai alerté et cherché de l'aide, pas tant pour moi-même que pour des collègues qui m'avaient rapporté des situations d'agressions sexuelles de la part de ces hommes : dans les deux cas, j'ai été ridiculisée et confrontée à la minimisation et la dénégation. Je précise qu'à chaque fois, les personnes vers qui je me suis tournée étaient des femmes. Et je crois que leurs réactions ont été presque plus difficiles à encaisser pour moi que le comportement de ces harceleurs.

Dans ces deux situations de harcèlement caractérisé, qui concernaient plusieurs victimes, et se perpétuaient dans le temps, je me suis confrontée aussi à l'image du lycée comme un lieu nécessairement sain et sécure, un lieu d'apprentissage et de savoir dont la violence serait par définition exclue. Un lieu où l'on pouvait, en tout cas, être protégé-e en cas de problème, à partir du moment où ce problème était signalé.


Cette seconde « strate » m'a donc posé plus de difficulté, bien que ces deux situations aient eu en elles-mêmes moins de conséquences sur moi que les agressions dans la rue : ce qui en a eu, c'est le constat que se plaindre n'était pas forcément efficace, et que la solidarité n'était pas du tout évidente, y compris entre femmes. Le mépris affiché par la gestionnaire du rectorat et l'infirmière scolaire est resté gravé dans ma mémoire : mais qu'en faire ?
Ces deux hommes sont restés à leur poste, et ont continué à nuire. Contrairement aux situations de la 1ere « strate », celles-ci m'ont confrontée à la culpabilité et à une forme de désarroi : n'aurais-je pas du aller plus loin dans mes dénonciations, insister, n'avaisje pas une responsabilité envers les autres personnes déjà victimes ou qui pouvaient le devenir ?

J'ai travaillé successivement dans 6 établissements, avec 6 proviseurs ou principaux différents : 4 sur 6 avaient des comportements de harcèlement (moral uniquement pour la plupart) envers leurs collègues directs (intendant-e, proviseur adjoint, secrétaire...). La violence entre élèves était palpable et quotidienne dans ces établissements. En fait, la violence en général était palpable dans ces établissements, à tous les niveaux, entre adultes, entre enfants, entre adultes et enfants : des atmosphères particulièrement pénibles.

Plus près, les agressions entre pair-es, au collège et entre ami-es 


La violence entre élèves inclut aussi le harcèlement sexuel et les agressions sexuelles. Bien que j'en ai conscience depuis très longtemps, évoquer les situations auxquelles j'ai été moi-même confrontée en tant qu'élève/enfant est encore très compliqué. Et je dois admettre que je n'en ai jamais parlé. Là encore, parce que cette violence est terriblement taboue.


L'idée que des enfants ou de jeunes adolescent-e-s puissent s'agresser sexuellement entre eux heurte en général nos représentations.
Je pense que ma grande difficulté à évoquer ces situations tient aussi au fait qu'elles impliquaient des personnes plus proches affectivement : des élèves de ma classe, qui est restée la même du CE1 à la 3ème. Certains de nos parents étaient amis. Nous allions parfois les un-e-s chez les autres, nous nous voyions en-dehors de l'école.
Il est représentatif que pendant très longtemps, la seule situation dont je me sois souvenue était la suivante : un garçon d'une autre classe, en 5ème-4ème, qui me suivait aux toilettes, m'attendait devant la porte, essayait de me toucher (ce qu'il faisait avec d'autres filles). Ce garçon, je le connaissais à peine (je ne me rappelle pas son prénom), il n'évoluait pas dans mon cercle de connaissances, et en-dehors de ces rares épisodes je n'ai eu aucun contact avec lui.

Mais il y a eu d'autres situations que j'ai refoulées pendant très longtemps :
• l'une impliquant un garçon faisant partie de mes « amis », qui me poursuivait de ses ardeurs malgré mes refus répétés, et est allé jusqu'à me montrer son sexe (pensant sûrement que ça me ferait changer d'avis...!) ;
• l'autre, le harcèlement subi par un groupe de filles, que j'ai mis des années à qualifier de harcèlement sexuel, alors que c'en était : et pas le moins acharné. Insultes, images pornographiques, « petits mots » transmis pendant les cours me mettant en scène dans des situations sexuelles, etc.

Comment dénoncer de tels faits commis par des filles de 13 à 15 ans ?
Voilà une situation à laquelle on ne m'avait pas du tout préparée.

Pourtant le comportement de ces filles a eu sur moi un impact bien plus grave que celui des deux garçons cités précédemment. Parce que plus haineux, plus durable, avec une intention marquée d'humilier. Et parce que ce n'était pas pour moi représentable d'être agressée sexuellement par des filles de mon âge, et qu'il était inimaginable d'en parler à qui que ce soit. Ce n'était pas des filles « masculines », ni considérées comme rebelles, agressives : des filles de familles plutôt aisées, féminines voire très féminines, ne posant aucun problème aux adultes ni à l'institution scolaire.

Je ne suis pas la seule, les situations de harcèlement et d'agressions sexuelles entre filles à l'adolescence sont certainement plus fréquentes qu'on ne le croit. En y repensant, je me confronte à cette interrogation : où ont-elles appris cette violence ? Qu'ont-elles reproduit ? Et je m'aperçois que j'ai plus de difficulté à me poser la question concernant les garçons et les hommes, comme s'il était plus « naturel » ou « attendu » qu'ils soient violents.

Beaucoup plus près : la violence des adultes envers les enfants, les proches, la famille 


Une partie de l'explication se situe peut-être dans une autre situation, plus ancienne, et plus difficile encore à admettre : la prof de sport en CE1 qui fait des remarques humiliantes sur le physique des enfants. Qui fait des « plaisanteries » ambiguës lorsqu'elle nous fait faire de la lutte, ou lorsqu'on va à la piscine. Elle me met systématiquement en binôme avec un petit garçon qui fait le même poids et la même taille que moi (nous sommes les plus petits et les plus menus), et elle s'amuse beaucoup à se moquer de nous, à suggérer des attitudes sexuelles – ce que, à 7 ans, nous ne sommes pas tout à fait en mesure de comprendre, et que nous saisissons pourtant.
Tout le monde rit, j'ai le souvenir aigü de l'humiliation que je ressentais, je me souviens du sentiment d'intrusion que provoquaient ses remarques sur mon corps. Je n'ai jamais oublié cet épisode, bien que je l'ai longtemps enfoui.

Malgré tout, là aussi, j'ai mis très longtemps à admettre le caractère sexuel de ses propos et de son attitude, le fait que ce comportement rentrait dans le cadre du harcèlement. Encore aujourd'hui, j'ai du mal à intégrer qu'une femme adulte puisse humilier sexuellement des enfants de 7 ans, mais je sais d’expérience pourtant que c'est possible.

La violence sexuelle des adultes envers les enfants des deux sexes est aussi répandue que taboue...
Evoquer le harcèlement et les agressions qui se produisent dans les familles, dans les cercles d'ami-e-s reste particulièrement difficile.

Dénoncer une personne proche, avec laquelle on a des liens affectifs, est une épreuve qui est souvent risquée, et peut s'avérer insurmontable.

Admettre également la violence exercée par les femmes, en particulier par les femmes envers d'autres femmes, que ce soient dans un couple, dans une famille, dans le cadre d'une relation éducative, vient heurter nos représentations encore très ancrées d'une supposée « non-violence » féminine naturelle, et des relations forcément protectrices des adultes envers les enfants dont ils ont la responsabilité.

Visibiliser la violence sexuelle des hommes entre eux, sans doute beaucoup plus répandue qu'on ne le croit – je connais plusieurs personnes de mon entourage plus ou moins proches qui l'ont subie.

Toutes ces situations se situent, je crois, au centre du cercle, et il nous faudra encore du temps pour pouvoir les aborder et les affronter, dans une perspective féministe, sans craindre de minimiser la domination masculine et les violences faites aux femmes. Parce que ça ne s'oppose pas.

De la réalité complexe des violences sexuelles 


En listant toutes ces situations, j'ai compris que la violence sexuelle, si elle s'inscrit dans la domination masculine, ne se limite pas au genre/sexe.
La violence sexuelle n'est pas tant une question de sexualité que de pouvoir : cela peut arriver dans toute situation où il y a rapport de domination. Entre un-e adulte et un-e mineur-e, entre un-e parent-e et un-e enfant, entre un groupe et un individu fragilisé/dominé, etc.
Plusieurs types d'oppressions peuvent être en jeu, qui sont toutes liées : homophobie, transphobie, domination adulte, racisme, validisme, etc... Il ne s'agit pas de désir ou de pulsion sexuelle, mais de l'expression et de l'exercice d'un pouvoir sur l'autre, qui vise à le soumettre.
A ce titre, l'éducation sexuelle n'est pas une solution suffisante : il faut travailler sur les rapports de pouvoir et de domination.

Aussi étonnant que cela puisse paraître, malgré mon féminisme, mon engagement sur ces sujets, mes prises de positions, je continuais à minimiser, à masquer, à me protéger de cette réalité.
Je ne prétends pas avoir épuisé toutes les situations que j'ai rencontrées dans ma vie : depuis le début de ce mouvement #MeToo, et l'écriture de cet article, des souvenirs me reviennent régulièrement en mémoire. J'ai l'impression que ça n'a pas de fin, et c'est effrayant.

Cette multiplication de témoignages nous place toutes et tous face à une réalité très éprouvante psychiquement : admettre que les situations de violence sexuelle jalonnent nos existences depuis des années, c'est faire face à une image de soi et du monde qu'on préfèrerait ignorer. Et pourtant, c’est une première étape essentielle pour que demain ces situations ne se reproduisent plus.



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9 mai 2017

Le Guide "Anti-Stress" de la Vie au Collège

Avertissementtoutes les images de ce post sont extraites de Le Guide Anti-Stress de la Vie au Collège, d'Irène Colas et Colonel Moutarde, éditions Milan, 2013, et ne sont pas libres de droits



"Ne croyez surtout pas que le collège 
n'est qu'une grosse usine à bourrer le crâne des élèves 
sans se préoccuper des difficultés qu'ils peuvent rencontrer"
Le Guide Anti-Stress de la Vie au Collège 



Flâner au rayon jeunesse de la médiathèque municipale n'est pas sans risques. On peut se trouver soudain nez à nez avec un bouquin sournois, flatteur et malsain, mis en évidence par les bibliothécaires (inconsciemment, j'espère). 



J'ai voulu savoir ce qui se cachait dans ce "coup de coeur" du moment : Le Guide Anti-stress de la vie au collège, d'Irène Colas et Colonel Moutarde.


Un guide à destination des futurs collégiens, qui s'annonce "cool", "sans blabla", "sans tabou", et qui vouvoie son lecteur : c'est bien, de vouvoyer un-e enfant comme on le ferait d'un-e adulte, si cela exprime une volonté de le respecter et de minimiser le rapport de domination. Mais ici, il s'agit plutôt de lui faire comprendre que l'enfance est terminée et que la rigolade est finie. "Il est temps de se prendre en charge !", et de montrer qu'on a "évolué", "au lieu de couiner", "pauvre petit chou". 
ça vous heurte un petit peu ? Ce n'est que le début.


Ce guide qui prétend rassurer et déstresser est une liste interminable d'injonctions, très souvent contradictoires, de menaces, de mises en gardes, de culpabilisation et parfois de moqueries. Si j'ai choisi d'en parler, c'est parce qu'il condense, sous couvert d'humour, beaucoup des manières habituelles de s'adresser aux enfants et aux adolescent-es, et parce qu'il entretient les conditions de bien des formes de violences scolaires.


Petit florilège et décryptage en 3 points :


1 ) Normes de genre, hétérosexisme et conformisme


- "Soyez au top de vous-même" : "Assurez un look branché", c'est une "priorité" : soyez "stylé", "looké", bien habillé-e. Ne faites pas de fautes de goût, c'est impardonnable. Si vous choisissez un sac "nul", ne venez pas chouiner quand on vous jettera des cailloux à la récré.





- Mais sachez qu'"Il n'y a pas que l'apparence dans la vie !", voyons ! Ne cédez pas à la pression des "fringues de marque" et ne coutez pas trop cher à vos parents.




- Intégrez les contraintes sexistes et les codes genrés : les filles, soyez sexy, portez talons, mini-jupes, sac à main et soutien-gorge, et restez fine comme une liane. Vous avez 10 ans ? Et alors ? En revanche, ne soyez pas putes, c'est "inadapté au collège". Donc court, mais pas trop, merci. Les garçons, eux, peuvent faire à peu près ce qu'ils veulent, y compris opter pour un look un peu débraillé/décoiffé, "stylé sans le faire exprès". 




 




















- Résignez-vous à la norme hétérosexuelle : vous allez très très bientôt tomber amoureux-se d'un-e élève de l'autre sexe, que vous le vouliez ou non ! Scoop : l'homosexualité, la bisexualité, la transidentité et autres joyeuse-tés n'existent pas. Où avez-vous vu un truc pareil ?!



- Inspirez-vous des adolescent-es accompli-e-s que sont les élèves plus âgé-es, qui n'existent qu'en version unique et ultra-stéréotypée. Car bientôt, c'est à ça que vous ressemblerez vous aussi (non, il n'y a pas d'alternative, désolée. Tomboys, garçons efféminés, petit-es, grand-es, gros-ses, personnes handicapé-es, binoclard-es et boutonneu-ses, passez votre chemin). 



2 ) Compétition, culture de l'excellence, de l'effort et du mérite :

- TRAVAILLEZ, petite feignasse : "Travailler mieux pour être plus efficace" (ah non, pas pour gagner plus...), " aucun effort n'a jamais tué personne", "vous êtes encore loin de la surchauffe cérébrale", "appliquez-vous", "entraînez-vous", " participez !", "osez !", soyez actif-ve, spontané-e, impliqué-e... "Il va falloir vous plier à une rigueur nouvelle qui vise à vous rendre efficace à 100%". Et commencez à penser à votre retraite, vous allez sur vos 11 ans tout de même (voir la page "Cap sur votre orientation").


- Soyez parfait-e et ne faites jamais d'erreur (vous n'êtes pas là pour apprendre) : "faire des fautes d'orthographe c'est comme ne pas se laver les dents, ça ne se fait pas, c'est tout". Je garde cette phrase pour un top 10 des punchlines éducatives. 

- "Il n'y a pas que les notes".


- Soyez le-la meilleur-e. Mais pas complètement : parce que "Mieux vaut être le meilleur, non ?". Oui, mais le petit bémol, c'est que "vous risquez de passer pour l'intello de service",  et d'être "stigmatisé-e". Dans ce cas...eh bien débrouillez-vous.


- Ne soyez pas trop sérieux, c'est chiant : "il faut aussi prendre le temps de se détendre", "relâchez la pression", "Travaillez votre sociabilité", "soyez souriant", "ne la ramenez pas", "sachez écouter les autres".


- Arrêtez de vous amuser : "oubliez les billes, les cartes à collectionner et la corde à sauter". Mais "choisissez d'être vous-même avant tout, c'est ce qui vous va le mieux". lol.




3) Soumission et adaptation à la domination adulte :


- Ne vous plaignez de rien et n'ayez aucune revendication : Votre sac est beaucoup trop lourd ? "Faites du sport ! Un dos bien musclé, des cuisses qui tiennent la route, sauront mieux vous aidez à soulever ce fardeau". Que du bon sens.


- Soyez soumis-e et obéissant-e : prenez l'habitude des exigences de chaque prof et adaptez-vous ; répondez toujours "absolument" aux appels de vos parents.

 Réponse : bah oui...vous n'avez pas le choix !


- Soyez autonome (non, ce n'est pas incompatible) : "prenez vous en charge ! ", "ayez l'air d'avoir évolué !", "faites preuve d'initiatives", "débrouillez-vous seul". "Le temps de l'école primaire, où on vous mouchait le nez parce que vous aviez un gros chagrin, est bien fini". (Cool. ça déstresse tout de suite, non ?)



- Soyez reconnaissant-e : "Vous voyez bien que tout est fait pour vous être agréable !" (?), "La plus grande attention est toujours accordée à tout nouvel élève", "la mission du prof n'est pas fastoche" et "vous leur devez le respect" (il n'est rien dit de l'inverse, en revanche, du coup on sait pas).
En cas de problème, "les surveillants ou encore la psychologue scolaire sauront très bien s'adoucir [oui, oui, s'adoucir] et vous écouter le plus attentivement du monde". Enfin, s'ils ont 30 secondes de libre au milieu de la cour. Ou, pour la psychologue, s'il y en a une . Et si elle est là (une demie-journée par semaine pour 600 élèves, en moyenne). Mais, chut, on ne va pas vous stresser quand même !



...et j'en passe, parce que je suis un peu fatiguée.






Si vous tenez absolument à lire ce livre, faites-le en imaginant être en CM2. Vous verrez, ça calme. Et si vous êtes vraiment en CM2, vous avez toute ma compassion. Cherchez vite un autre bouquin - promis, dès que j'en trouve un bien, je vous fais signe.










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6 avr. 2017

"Mauvais élèves"




"Mauvais élèves", de Nicolas Ubelmann et Sophie Mitrani - visible sur Vimeo.

 




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1 mars 2017

Tour d'horizon - janvier/février 2017


"Il faut poser des questions aux enfants. Personne ne leur demande comment ils vivent. 
Les enfants ont peur de ne pas être crus, alors ils ne vont pas parler spontanément. 
Il faut expliquer aux enfants qu'ils ont des droits."
Muriel Salmona


http://www.lemonde.fr/societe/article/2017/02/02/harcelement-scolaire-l-etat-reconnu-en-partie-responsable-du-suicide-d-une-collegienne_5073696_3224.html


Le combat de Nora Fraisse, dont la fille Marion s'est suicidée en 2013 suite à plusieurs années de violences au sein de son collège, marque une étape dans la lutte contre le harcèlement : la justice désigne la responsabilité de l'Etat, et donc de l'institution scolaire, dans la mort de Marion.
Dans son livre Marion, 13 ans pour toujours, Nora Fraisse raconte le déni de responsabilité du collège et du ministère auquel elle a du faire face, et notamment l'absence de réaction de l'établissement face aux difficultés pointés par Marion et sa famille. 
Sur le même sujet, on peut lire un article agrémentés de nombreux liens et références sur Madmoizelle.

Cette décision de justice contribuera peut-être à ce que l'on cesse de considérer le harcèlement comme un simple problème relationnel entre enfants/ados/élèves, mais comme une question institutionnelle et politique. 



http://www.oveo.org/censure-de-larticle-222-de-la-loi-egalite-et-citoyennete-par-le-conseil-constitutionnel/

Pendant ce temps, l'amendement contre la fessée est rejeté par le Conseil Constitutionnel. Cet amendement visait à supprimer le "droit de correction" (une notion de jurisprudence) qui vient contredire l'interdiction des violences faites aux enfants inscrites dans le Code Pénal : les enfants, bien que plus vulnérables, sont soumis à cette exception qui rend légale la violence "éducative". La violence exercée par les parents pour raisons "éducatives" n'est en outre pas nommée dans le Code Pénal.
Le "droit de correction" a été progressivement aboli pour les militaires, les femmes, les employés, les prisonniers... mais pas pour les enfants. 
L'Observatoire de la Violence Educative Ordinaire (OVEO) publie à ce sujet un communiqué de presse à l'attention des candidats à la présidentielle.


http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20170227.OBS5866/enfants-maltraites-la-violence-fait-disjoncter-le-cerveau.html

La violence envers les enfants est pourtant aussi répandue que taboue... et ses conséquences sont dramatiques, comme l'explique la psychiatre Muriel Salmona : "75% des maltraitances graves ont lieu dans un contexte de punition. Les enfants qui sont morts récemment étaient "punis"". 
Elle nous rappelle au passage que loin d'être "utile" ou "éducative", "la violence aggrave les troubles du comportement chez l'enfant, comme ses troubles cognitifs."
Muriel Salmona relie la violence familiale à la violence scolaire : un enfant (ou toute personne) victime de violences va mettre en place un mécanisme de protection psychique appelé dissociation, dans le but de ne pas ressentir la souffrance. "L'enfant peut avoir l'air indifférent. Il peut donner l'impression d'être à l'ouest, voire idiot. (...) Une personne dissociée peut être la proie de pleins de gens. C'est ainsi que l'enfant maltraité va ainsi souvent être harcelé à l'école. Que des prédateurs peuvent fondre sur une jeune fille car elle n'est pas capable de se défendre. 70% des personnes qui ont subi des violences dans l'enfance subiront des violences toute leur vie, précisément parce qu'elles restent dissociées." 
A quoi il est important d'ajouter que les enfants/élèves agresseurs/harceleurs ont probablement, dans un certain nombre de cas, subi eux aussi des violences.


Si vous avez lu/vu/entendu d'autres choses sur le sujet, n'hésitez pas à les partager dans les commentaires.




Bonnes lectures  !
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23 janv. 2017

Migraine













Anne-Laure Buffet développe cette idée de répercussion physique des violences psychologiques, sur son site internet et dans ses conférences.

Une belle émission sur la migraine : "Comme une ombre", de Loris Bardi.




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